En parcourant le journal « 20 minutes », je tombe sur une pépite.
En Ukraine, un homme s’accuse d’avoir mortellement poignardé son beau-père. Au téléphone, il déclare aux forces de l’ordre de venir avec un chasse-neige, son chemin étant totalement inaccessible.
Bilan de l’histoire : cet homme a signalé un meurtre fictif afin de bénéficier d’un déneigement gratuit.
Cet improbable « fait divers » m’amène à me poser une multitude de questionnements :
– sur le mensonge,
– sur l’intérêt individuel au détriment du collectif,
– sur le sens du devoir et de l’effort,
– sur le ressort de la créativité humaine et
– sur le taux d’alcoolémie nécessaire pour passer ce coup de fil…
Dans cette chronique, je n’aborderai que le mensonge tel qu’il est défini dans le dictionnaire Larousse : « i.e comme une assertion contraire à la vérité, i.i quelque chose de faux, illusoire, trompeur. »
Existe-t-il un « droit de mentir » quand il est bien intentionné ?
Pouvons-nous même concevoir qu’un mensonge soit sans intention de mentir ?
Alors que l’interdit du mensonge est l’un des principaux piliers de l’éducation transmise à nos enfants, il semblerait qu’en tant qu’adultes ce soit socialement et même moralement acceptable de mentir pour le bien d’autrui ou le bien commun, beaucoup moins si c’est pour son intérêt personnel.
Puisque nous nous accordons à affirmer que « toute vérité n’est pas bonne à dire » par opposition nous pourrions donc imaginer que « certains mensonges sont alors, bons à taire ».
Si l’on ajoute à cela, les « fausses vérités » et les « vrais mensonges », nous pourrions être à deux doigts d’être méfiants à l’égard de la « vérité », la sienne et celle de l’autre.
D’ailleurs pour l’homme politique Edouard Herriot « une vérité est un mensonge qui a longtemps servi ».
En médiation, on croise le mensonge dans tous ses états : le mensonge par oubli, le mensonge manipulateur, le mensonge par dissimulation ou par omission, le mensonge protecteur, bienveillant.
Le mensonge par préservation aussi, par ce silence des mots et ce bruit des non-dits, celui qu’on appelle « le secret de famille. »
Celui-là même, justifié pour le soi-disant bien de la famille.
Cet acte silencieux, volontaire ou contraint, mécanisme de protection ou de défense, est une arme de destruction massive transgénérationnelle, passeur d’angoisse.
Vous le savez bien, en médiation l’objectif n’est pas de déterminer le vrai du faux ou de s’attacher à la recherche d’une vérité.
C’est de retrouver, autour d’un langage audible, un terrain commun.
Et pour en revenir à notre ami ukrainien, il aura écopé d’une verbalisation de 3,5€ pour « déplacement abusif des forces de l’ordre », ça ne fait pas cher le déneigement, j’y penserais peut-être l’hiver prochain.
Allez, je vous dis à bientôt.
Miss Utopie